Interview de Rafa - S.O de RG


13e jour - Interview de Rafael Nadal - vendredi 6 juin 2008

Q. Rafa, à certains moments, le public était très calme. Il semblerait que le public ait été surpris par la qualité de tes coups.

R. Pour penser à ces choses-là, il faut penser à d'autres choses. Ce n'est pas mon cas. Je me concentrais sur mon jeu. J'ai bien joué. Au cours des premiers sets, mon niveau de jeu a été incroyable, presque parfait. Je suis très heureux de la façon dont j'ai joué aujourd'hui. Le meilleur match à Roland Garros jusqu'à maintenant !

Q. (Hors micro.) Penses-tu que tu peux être en meilleure forme ?

R. En meilleure forme que les deux premiers sets, cela va être difficile, parce que j'ai très bien joué. On peut toujours mieux jouer, mais j'ai bien frappé la balle, tant en coup droit qu'en revers. J'ai changé la direction du jeu. J'étais davantage à l'intérieur du court, plus que d'habitude en tout cas. Je suis très heureux de ma performance aujourd'hui.

C'est difficile de jouer à ce niveau-là, mais c'est encore plus difficile d'avoir un tel niveau face à un joueur comme Djokovic.

Q. Quand tu menais 3-0 dans le troisième set, était-ce difficile de garder ta concentration ?

R. Non, j'ai livré un mauvais jeu à 3/0. Ce jeu était très mauvais. J'étais un peu nerveux. Si j'avais mené 4/0, j'aurais gagné le match. J'ai fait quelques erreurs, 3/2, 15-40, j'ai sauvé le jeu ; j'ai mené 4/2. 5/3, 15-40 a été le moment le plus important du match. Je savais qu'il fallait que je remporte ce jeu. J'ai pu me remettre dans la partie. Djokovic est un très grand "relanceur". Il jouait très bien à ce moment-là. Je savais qu'à 5/4, cela aurait été difficile. 30-15, ensuite un coup droit sur la ligne, puis j'ai joué un bon point pour finir avec une amortie. Il m'a pris mon service et a eu une balle de set. Cela a été dur mentalement, parce que l'on pense avoir le match en main, et puis il devient compliqué, surtout lorsqu'on mène 2/0 et deux breaks d'avance. Je me suis dit que, de toute façon, s'il devait me battre, il fallait qu'il joue deux sets de plus.

Q. Peux-tu nous parler du jeu décisif ? Avant, tu avais sauvé une balle de set. Tu as bien joué au tie-break. Quel était ton état d'esprit lorsque tu as commencé le jeu décisif ?

R. J'ai analysé la situation, bien évidemment. Au départ, mon niveau de jeu était incroyable, deux sets à rien, deux breaks d'avance, je maîtrisais tous les points. Et puis, au cours des derniers jeux du troisième set, il avait la maîtrise, le contrôle du jeu. J'y ai pensé, j'ai pris une décision. Je savais qu'il fallait que je rentre dans le court, que je gagne la partie. Je me rendais compte qu'il rentrait également dans le court. Je me suis dit qu'il fallait que je rentre dans le court. Soit je perdais le tie-break, soit je le gagnais. Je n'avais pas le choix. J'ai très bien joué le tie-break. J'ai délivré des coups droits remarquables.

Q. As-tu vu que Borg était là, derrière toi, près de la ligne du fond du court ?

R. Non, je n'ai vu personne.

Q. Si Federer l'emporte en demi-finale, tu vas disputer de nouveau une finale contre lui. Je crois que tu l'as battu 9 fois sur terre battue, 3 fois de suite ici. Penses-tu que tu dois adapter ton jeu face à Roger sur terre battue ?

R. Jouer Federer est spécial. C'est un joueur différent. C'est différent. La tactique est souvent différente. Bien sûr, je vais essayer de jouer mon jeu. Pour m'imposer face à lui, il faut que je sois à mon meilleur niveau. Si je ne joue pas à mon meilleur niveau, je ne pourrai pas disposer de Roger. La meilleure tactique est de très bien jouer.

Q. Sur la balle de set, ce coup droit, savais-tu qu'il fallait frapper un superbe coup droit ?

R. Pardon ?

Q. Pensais-tu qu'il fallait que tu délivres un coup gagnant ?

R. En réalité, je ne voulais pas frapper un coup gagnant. J'ai fait un point gagnant, il a fait un retour rapide. Et puis, j'ai répliqué immédiatement. Avant de toucher la balle, je n'avais pas pensé à faire un coup gagnant. J'ai essayé de jouer un coup à la fois difficile pour lui, mais un coup sûr, un coup avec de la sécurité.

Q. Ce court est un peu comme chez toi ?

R. C'est un court spécial pour moi, bien évidemment. Je garde des souvenirs incroyables de ce court. C'est toujours un sentiment particulier que je ressens sur ce court, notamment lorsqu'il est plein. C'est toujours plein d'émotion que je reviens sur ce court. Je voudrais remercier tout le monde, parce que la foule a toujours manifesté un grand respect à mon égard. Je voudrais remercier tout le monde, notamment l'organisation.

Q. Penses-tu que tu peux perdre sur ce court ?

R. Quand je foule ce court, j'ai l'impression que je peux perdre à n'importe quel moment.

Q. Peux-tu nous dire quand était la dernière fois que tu as été très nerveux ?

R. Je ne sais pas… En 2006, au premier set, contre Grosjean, le problème avec la foule en 2005, un set partout, un break d'avance. Et puis, c'était plus dur. Et puis aussi contre Mathieu. C'est tout !

Q. Cela commence à être une routine d'être ici en finale. On a eu une peur avec Djokovic, qui a joué un championnat d'Australie en tant que champion.

R. J'aimerais que ce soit une routine, les choses iraient très bien ! Ce n'est pas une routine. Je suis content d'être à cette finale. J'ai fait un grand tournoi. Je vais essayer de jouer le tout pour le tout, pour arriver au sommet. La quatrième victoire ici serait incroyable pour moi.

La façon dont s'est déroulé le match, c'était plus facile que ce à quoi je m'attendais. Je ne m'attendais pas à jouer au niveau auquel j'ai commencé à jouer. Je m'attendais à… C'était difficile pour lui. Je dominais le court. J'envoyais les points où je voulais. Cela me donnait de la sécurité. Je tapais très fort, en coup droit comme en revers, sans penser que je pouvais commettre des erreurs. C'est fondamental.

Djokovic, comme le grand joueur qu'il est, après avoir baissé son niveau, les choses se sont compliquées pour lui. Malgré le break, lorsqu'il a vu une opportunité, il s'est engouffré dans la brèche.

Q. Après ce qui s'est passé ici aujourd'hui, tous les doutes se dissipent. Nadal ici, pour la finale…

R. Ce sera dans un jour et demi. Cela va être un match différent. Je ferai face au meilleur de l'histoire. Même si l'on est presque parfait, cela ne suffit pas. On verra ce qui se passera.

Q. Au troisième set, tu dis que tu n'as pas forcément baissé. Peut-être as-tu ralenti ?

R. J'ai joué un très mauvais jeu.

Q. Peut-être n'as-tu pas mis la pédale douce, mais n'as-tu pas forcément joué comme tu l'aurais aimé, comme aux premier et deuxième sets. Ne penses-tu pas qu'il fait ce qu'il peut, parce que c'est tout ou rien ?

R. Je joue contre celui qui jusqu'à aujourd'hui a été le meilleur de l'année et contre un grand champion. C'est la réalité. Si tu te déconcentres et baisses de niveau, tout peut arriver. Cela s'est déjà produit. J'ai simplement mal joué. Après, ayant perdu ce qu'il avait perdu, s'il se laissait un peu aller… Je commençais à servir avec le vent contre, j'ai sauvé pour égaliser à 3/3. Jusqu'à 7/3, 15-30 pour moi. J'ai retourné avec le vent contre. Je savais très bien qu'il pouvait faire le break à 5/4. Je n'ai pas joué un mauvais jeu, mais il a joué un peu mieux.

Q. Rafa, tu as suivi les matches au cours du tournoi. As-tu eu le temps de voir les matches de Federer ? Les as-tu analysés ? As-tu vu quelque chose qui t'a impressionné ? Le vois-tu à un niveau supérieur vis-à-vis des doutes qu'il a eus au début de l'année ?

R. Je ne regarde pas tant que cela le tennis. J'aime bien regarder des matches, mais je ne fais pas un suivi de Federer. J'aime jouer contre lui, parce que c'est spectaculaire. Je n'ai pas analysé un match, non. Sincèrement, je l'ai très peu vu jouer. Peut-être un match, oui. Contre Benneteau, j'ai vu son match.

Pour moi, il joue très bien. Quand vous disiez qu'il était si mal, je ne le voyais pas si mal… Peut-être a-t-il eu un problème avec sa mononucléose, mais c'est humain. C'est un humain. Perdre en demi-finale de l'Open d'Australie contre Djokovic, également contre Fish et Radek. Pour le reste, cela rentrait dans les programmes. En général, il arrive très haut ici, cela a été étrange, bizarre. Ce sont des choses qui arrivent à tout le monde. Le problème, cela a été Stepanek. Le reste, c'est difficile pour tout le monde, même pour Federer. Je ne sais pas si c'est le meilleur de l'histoire, mais il est là. Il y a longtemps qu'il n'a pas joué un mauvais match. Il est très solide. Il l'a été tout au long du tournoi et des autres tournois qu'il a disputés. Il n'a eu aucun match compliqué, difficile.

Q. Quel est le danger le plus grand pour toi, dans un match comme celui-ci, pour une finale ? Le plus grand danger, est-ce toi-même ? Qui est-ce ? Quel est le plus grand Federer que tu as rencontré sur terre ?

R. Le problème, c'est l'adversaire. Quand je joue contre Federer, c'est le pire qui peut arriver en finale. C'est toujours le même et toujours le plus difficile à jouer. Peut-être le meilleur Federer contre moi, sur terre battue, cela a été à Rome, en 2006.

Q. Aujourd'hui, il y avait beaucoup de vent.

R. Oui, en tout cas, moins que le premier jour. On ne pouvait pratiquement pas jouer. Parfois, sur le Central, il y a des tourbillons. C'est très difficile. Aujourd'hui, le match était très compliqué.

Q. J'ai cru que tu étais désespéré. Pareil avec Amlgro.

R. Il n'y avait pas de vent.

Q. Alors je me trompe. Est-ce parce que tu as beaucoup joué là, ou ta façon de frapper t'a-t-elle permis d'en donner plus ?

R. Non, ce n'est pas ma façon de frapper la balle. Ma façon de frapper la balle dans le vent me permet de jouer plus plat. C'est plus difficile de donner des effets quand on est contre le vent. C'est plus compliqué. Celui qui sait bien jouer dans ces conditions, c'est Andre Agassi. Il joue très plat. La balle bouge moins quand on la frappe très fort, quand on joue avec ce genre d'effet, en bougeant plus le poignet.

Q. Cela fait quatre ans que tu es ici, à cette même table. Ce sont les mêmes. As-tu l'impression que les choses ont changé ? Te sens-tu aussi nerveux ?

R. Non, je suis assez à l'aise. J'ai été assez calme jusqu'à présent. Je pense que tout est pareil. Rien n'a changé. Ce qui a changé, c'est que j'ai trois ans de plus, j'ai 22 ans, je ne suis plus une promesse. On m'a retiré cette étiquette "promesse". Malheureusement, je ne suis plus une promesse. Pour le reste, c'est toujours pareil, un peu de nervosité à la finale, comme tout le monde. Bien sûr, une finale, c'est toujours important à jouer.

Q. Toni me disait qu'il était prêt à une défaite pour demain. Il a dit que si tu perdais, il irait à la plage tranquillement.

R. Oui, Toni rentre à Majorque ! Moi, je vais à Queen's. Toni ira jouer à la balle comme il veut. Quand je rentre sur ce court, je suis préparé pour gagner, pas pour perdre. Mais tout peut arriver. Quand je joue un match comme aujourd'hui, lorsque je rentre sur le court, il peut se passer n'importe quoi. Ce sera un match complètement ouvert. J'irai sur le court. Je ne pense pas à la défaite. J'assume parfaitement le fait qu'elle peut se produire.

Q. Rafa, on revient au match que nous venons de voir. Tu as très, très bien servi. Tu as trouvé le service lorsque tu en avais besoin.

R. Oui, oui. Quand il y a eu des problèmes, à un moment donné, le service a bien répondu. Un 0/30 important. J'ai servi 2 fois de suite en changeant les effets, en faisant des coupés, surtout avec Djokovic qui renvoie la balle de façon incroyable, il est préférable de savoir varier. Il le met à deux centimètres de la ligne de fond. Au moment où j'ai servi, j'avais du vent en face.

Q. Quel plaisir prend-on quand on arrive à ce niveau de jeu ? As-tu pris du plaisir sur le court ?

R. J'étais très concentré. Je pensais surtout au point suivant. Je savais que je jouais à un très haut niveau et que, si j'arrivais à le maintenir... Bien entendu, l'autre peut toujours gagner. Je regardais comment se déroulait le match. Je me disais qu'il était difficile que l'orientation change si je continuais à jouer comme je le faisais à ce moment-là. Prendre du plaisir, non. Je savais que je jouais à un très haut niveau, c'est tout. On peut être satisfait de soi-même. Et, si l'on peut dire, prendre du plaisir, tout en sachant qu'il faut être prêt pour le point suivant à tout moment. Je pensais maintenir le cap, ne pas regarder en arrière, continuer à frapper vers l'avant. C'est ce que j'ai fait, sauf au troisième set. A la fin, j'ai réussi à m'en sortir. Mon obsession était surtout de ne pas m'arrêter de servir fort, de répondre en frappant fort.

Q. Toni a dit que tu n'allais changer aucune tactique contre Djokovic. FEDERER a l'air d'arriver en finale ; vous n'allez pas varier quoi que ce soit dans votre jeu pour ce match ? Cela a l'air de bien fonctionner.

R. Le tennis est un sport assez simple, on ne peut pas changer tellement les choses. Quand on fait quelque chose de bien, il faut continuer de le faire bien. C'est facile à comprendre.

Jouer un service-volée n'est pas mon jeu habituel. Si j'arrive à servir contre la ligne, à jouer 7 ou 8 balles très haut, cela va bien. Je ne vais rien inventer de particulier pour la finale. Les choses vont bien ou non. Les choses vont bien quand on fait bien ce que l'on fait. Après, on intègre différents éléments dans le jeu. Il peut être intéressant de défendre la balle en faisant un revers, en servant en parallèle. Ce sont des détails à l'intérieur d'un match. Le tennis est un jeu très simple.

Q. Rafa, la veille de la finale est-il un jour très différent des autres jours ? Vas-tu au restaurant ? Es-tu soucieux de penser que, demain, tu es à la finale ? Vas-tu te dire que tu as envie de manger ceci ou cela pour ne pas avoir de problème de digestion ? Ou, pour la finale, es-tu très détendu ? Fais-tu plus attention que les autres jours ?

R. Non, c'est comme d'habitude. A quoi penses-tu ? Si tu dois manger quelque chose que tu vas mal digérer, tant pis si c'est la veille de la finale ! Cela ne va rien changer. Je vais commencer à manger de drôles de trucs, après, non ? Par exemple, des choses qui vont me faire digérer. Si tu me donnes quelque chose à manger qui ne me réussit pas, attention ! Tu vas le sentir passer ! Tu peux commencer à courir !



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R
une bonne journée de récupération, ça a été dur aujourd'hui malgré tout physiquement et mentalement! un bon restau et dodo!
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R
j'ai vu une interview de corretja( qui parle français, enfin comme toni), il disait que rafa était un garçon très gentil, qui ne refusait jamais un autographe ou une photo, au restaurant des fois il est dérangé 10 ou 15 fois, mais il le fait toujours avec le sourire! que tout celui qui le connait et le côtoie ne peut que l'apprécier! ils cherchaient un prix orange? et avec les gosses au début de RG, il s'amuse avec eux et il prend du plaisir à le faire! pas la grosse tête chez les nadal!
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P
J'ai lu sur ses lèvres qu'Higueras criait "VAMOS VAMOS" au Suisse....ça ne devrait pas être permis !!  J'espère qu'il ne va pas recommencer pour la finale...
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R
ben non!
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R
le maître s'énerve!
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R
belle analyse rafa! change rien, tout est bien!gael fait bien courir rodgeur!
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